Partir au Japon, c’est découvrir une autre culture, d’autres paysages, une autre façon d’appréhender le monde et l’existence, et n’est aussi découvrir une autre langue.
Et le japonais a la réputation d’être une langue difficile, non pas à cause d’une grammaire complexe, mais en raison de ces deux « alphabets » syllabiques, les hiragana et les katakana, auquels s’ajoutent les kanji ou idéogrammes, en provenance de Chine.
Lô ayant étudié le chinois nous a dit que si la prononciation est différente – il y a des variantes de prononciation des kanji entre le chinois et le japonais, même si la base phonétique reste la même – l’idée, elle, est bien conservée. A défaut donc de pouvoir prononcer les mots, elle peut comprendre l’idée générale dans les kanji, au moins ceux qu’elle connaît. Il faut connaître 2000 kanji pour pouvoir lire un journal en japonais.
Le japonais fait partie de ces langues extrême-orientales dont l’enseignement est souvent considéré comme rare. En région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, on compte seulement 5 lycées qui proposent le japonais en deuxième ou troisième langue vivante (source : site de l’ambassade du Japon en France ).
Nous avons donc été à la fois stupéfaits et ravis de découvrir dans une ville toute proche de nos domiciles des cours de japonais, donnée par une association culturelle. Depuis octobre, nous suivons donc des cours de japonais donnée par une native, à raison d’une heure et demi par semaine.
L’association a la réputation, un peu négative dans la bouche de certains, d’organiser des activités pour le 3e âge. Cela peut tout à fait être démenti par le cours de japonais. Celui-ci est peuplé de personnes actives, qui préparent un voyage pour beaucoup voir une installation au Japon pour quelques-uns. Il y a même d’une demi-douzaine de lycéens dans l’impossibilité de suivre cet enseignement dans leur cursus à proximité de chez-eux. Ce sont pour eux des cours supplémentaires, choisis, bien que non diplomants et ces lycéens sont vraiment motivés. Il y a aussi quelques personnes qui suivent ce cours parce que leur fils ou leur fille a épousé un ou une japonais(e). L’apprentissage de la langue devient indispensable pour pouvoir communiquer dans une même famille.
L’ambiance des cours est à la fois sympathique, studieuse et ludique. Notre professeur nous a beaucoup fait travailler les adjectifs en « i » et nous donne à apprendre du vocabulaire courrant et utile dans la vie quotidienne, des formules de politesse aux noms des fruits et légumes. Nous pouvons à présent faire des phrases simples et nous avons commencé à apprendre à lire et écrire les hiragana.
Nous avons aussi une autre méthode qui consiste à apprendre quelques phrases par coeur, de façon à retenir la structure pour pouvoir la transposer, et surtout apprendre plus facilement le vocabulaire. S’enfoncer dans le crâne des listes de mots n’est pas chose facile et nous n’avons plus la rapidité d’apprentissage des jeunes enfants. Il faut donc contextualiser.
Il est cependant tout à fait illusoire de penser que nous pourrons communiquer en japonais pendant notre voyage. Les cours étant complétés avec des méthodes de langues, nous aurons au moins le bagage linguisitique pour ne pas passer pour des rustres barbares et dire à notre interlocuteur que nous ne comprenons pas un traitre mot de ce qu’il raconte (sumimasen, wakarimasen). Une autre question très importante que nous utiliserons sans doute beaucoup : sumimasen, eigoga wakarimasu ka ? (excusez-moi, comprenez-vous l’anglais ?)
Notre professeur de japonais nous a dit que dans son pays, les enfants de 6 ans maîtrisaient déjà les hiragana et katakana. L’entrée à l’école marquait le début de l’apprentissage des kanji. L’école française me fait alors l’impression d’être totalement arriérée.
J’ai lu que la transcription des panneaux en caractères latins avait commencé lors de l’occupation du pays par les troupes américaines, après la seconde guerre mondiale. Fort heureusement, les japonais ont aussi compris le potentiel touristique de leur pays, et les affichages en romanji se sont multipliés au Japon. Nous pourons au moins savoir à peu près où nous sommes et dans quelle direction nous diriger.
Nous serons tout de même en possition de quasi-illettrés au pays du Soleil Levant, ce que je trouves assez angoissant. Je crains un peu de me retrouver dans la même position qu’en Italie : alors que je comprends globablement la langue, mon incapacité à m’exprimer et à me faire comprendre me fait parfois passer pour une gentille idiote. Je me retrouve alors enfermée dans une bulle linguistique, cernée, lorsque mon cerveau arrive à saturation, par une bouillie de mots et de sons. Ce sentiment d’impuissance est très désagréable, surtout quand il conduit au renoncement.
Mon grand frère, qui est allé au Japon deux fois, me répète que je n’ai pas de soucis à me faire : avec les mains et les faux plats en plastique sur les devantures des restaurants, on arrive toujours à se faire à peu près comprendre ou du moins à survivre (c’est-a-dire ne pas mourrir de faim). Les japonais ont pourtant la réputation de parler assez mal l’anglais et de fuir les étrangers pour ne pas se retrouver dans des situations gênantes où ils seraient obligés de parler ce mauvais anglais, ce qui serait humiliant pour eux. Les mentalités changeant, j’espère que nous pourrons rencontrer des japonais qui démentiront totalement ce cliché.
Nous verrons donc comment cela se passe, mais le contact linguistique est une chose que j’appréhende assez.
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